Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Travisisdead
Travisisdead
Publicité
1 décembre 2005

Broken flowers

sans_titre12

Réalisé par Jim Jarmusch
Avec Bill Murray, Jeffrey Wright, Sharon Stone
USA - 2004 - 1h45

Célibataire endurci, Don Johnston vient d'être quitté par Sherry, sa dernière conquête. Alors qu'il se résigne une nouvelle fois à vivre seul, il reçoit une lettre anonyme dans laquelle une des anciennes petites amies lui apprend qu'il est le père d'un enfant de 19 ans, et que celui-ci est peut-être parti à sa recherche. Sous les conseils de son meilleur ami Winston, détective amateur, il décide de mener l'enquête afin d'éclaircir ce mystère. Malgré son tempérament casanier, le sédentaire Don se lance alors dans un long périple, au cours duquel il retrouve quatre de ses anciennes amours. A travers ces visites surprises, Don se retrouve confronté à son passé, et, du même coup, à son présent.

Voilà la rentrée cinématographique est arrivée (et bientôt rentrée scolaire pour moi :)) et ça débute donc par le grand prix de Cannes 2005.
Mais c'est avant tout un film de Jim Jarmusch, grand cinéaste, icône du cinéma indépendant d'auteur américain, que certains qualifie de cinéaste à la mode.
Pour ma part, je le voit plutôt comme un homme important dans la nouvelle génération de cinéastes d'auteurs, qui a apporté beaucoup au cinéma US: "Dead man" et "Ghost dog" en sont sûrement les meilleurs exemples.
Il revient donc, après "Coffee and cigarettes", avec un film écrit spécialement pour Bill Murray, ce qui laissait présager le meilleurs compte tenu de sa magnifique tournure artistique depuis "Lost in translation".

Tout d'abord, il faut signaler que regarder un film de Jim Jarmusch , ce n'est pas accessible au commun des mortels, il faut aimer ce genre de films, le rythme est lents, les plans s'éternisent souvent et souvent certaines scènes ont peu d'intérêts pour le développement de l'histoire (mais servent à émerger le spectateur dans l'ambiance du film).
On retrouve ici toutes ces caractéristiques avec bonheurs.
La trame principale du film n'est qu'un prétexte à nous montrer l'évolution de "Droopy" Murray, qui au fur et à mesure découvre le besoin de retrouver son fils. Au début du film, ce n'est qu'un homme perdant une énième conquête, pour aboutir sur un homme dont la seule importance est de connaître son fils afin de se rattacher à quelque chose de plus concret que des histoires d'amours sans lendemain.

S'en suit donc une série de quatre portraits de femmes. Quatre destins différents représentant la femme américaine actuelle. Et Jarmusch ne fait pas de concessions tout en restant relativement distant, ce qui laisse aux spectateurs la liberté d'interprétation. Ainsi, Sharon Stone joue la femme qui élève seule sa fille de façon un peu libérée, qui travaille dans l'organisation ou plutôt rangement de placards. Frances Conroy est somptueuse dans son rôle d'ex-hippie rangée qui bosse dans l'immobilier avec son mari qui la contrôle. Jessica Lange est devenue une communicatrice en animaux, lesbienne totalement perchée dans son monde et Tilda Swinton joue une plouc campagnarde rongée par la mort (enfin du moins c'est ce que l'on peut suggéré) d'un de ses enfants.

A première vue, ce ne sont que des successions de portrait plus loufoques les uns que les autres, mais Jarmusch veut nous montrer que nous sommes tous prisonniers d'une certaine façon.
Don (Murray), est prisonnier de lui même, de ses sentiments à cause du fait qu'il n'arrive pas à trouver l'amour. Laura (Stone), possède une vie banale et sans moindre intérêt, abandonnée de tout le monde avec sa fille. Carmen (Lange), est prisonnière de sa passion, la rendant quasiment folle. Dora (Conroy) est retenu par l'amour de son mari au point d'avoir totalement changée de vie, passant de hippie à paysagiste, un métier qui ne lui convient pas, mais auquel elle se force à faire pour le plaisir de son mari. Quant à Penny (Swinton), elle sombre dans une folie à cause de la perte d'un être cher et aussi de sa classe sociale. On peut même rajouter le personnage de Winston (interprété par Jeffrey Wright) qui lui est prisonnier de sa famille qu'il doit entretenir grâce à trois boulots.

Le tout berçant sur une nostalgie ambiante incarné par Don. En effet, Bill Murray interprète ici avec brio un homme qui est confronté face à son passé, qui doit y refaire face à nouveau pour mieux exorciser ses démons en quelques sortes. Il pourra ainsi se libérer afin de vivre en paix. C'est d'ailleurs peut-être le thème principal du film, relayant ainsi son enquête au second rang. Et c'est là que tous ces destins prennent une importance capitale: Don réalise silencieusement aux changements de son ancien entourage pour mieux réaliser que lui n'a pas évoluer, qu'il est toujours rester le même durant ces 20 dernières années. Ceci rejoint l'hypothèse que la lettre n'est autre qu'un message (je n'en dirais pas plus par risque de spoiler!!!)

C'est donc aux premiers abords un film léger, sans la moindre vraie profondeur, mais c'est en réalité tout autre chose, il s'y cache une analyse des comportements et de la condition humaine de l'américain moyen.
D'ailleurs certaines scènes qui peuvent paraître inutiles, sont lourdes de sens (je pense notamment à la scène où Bill Murray ouvre les volets de sa chambre d'hôtel pour observé le trafic dense d'une grande voie avec un ciel grisâtre.)

Certes, on peut rester sur sa faim par rapport à la scène finale, mais ça confirme le message du film avec subtilité.
La réalisation quant à elle est sobre, typiquement Jarmuschienne, avec énormément de fondu au noir comme dans la plupart de ses anciennes oeuvres. Le tout étant servie par une BO éclectique et surtout assez underground ce qui la rend franchement irrésistible.


En bref, je n'ai vu aucun autre film présenté à Cannes lors de cette année, mais ce "Broken Flowers" m'a totalement charmé par sa mélancolie et son intelligence sous-jacente qui permet d'affirmer que le cinéma américain peut être autre que ce que Hollywood essaie de nous faire bouffer.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité